Avec Ammar Foufou sur la trace des siens

 

François, 18 mars 2020

 

 

« La lettre de Jean-Marie Mire au vieux fellouz est poignante et d'une extrême humanité, m’écrivait Ammar Foufou, à la fin du mois de mai 2016. Je suis de ce coin d’Ali Charef. Âgé de 40 ans, je voudrais savoir si Monsieur Jean-Marie Mire est encore en vie. »

 

 

C’est ainsi que tout a commencé.

 

 

Le lien s’est fait aussitôt entre nous trois, car je me suis occupé d’Ali Cherf, depuis Collo, j’en ai aussi rapporté quelques photos, et il a même été question de m’y envoyer comme chef de poste au printemps 1960. Pendant des mois nous avons correspondu, au rythme parfois de plusieurs messages par jour. Ammar essayait de reconstituer l’histoire de sa famille : guidé par ses proches, il interrogeait les témoins survivants, faisant ressurgir le passé enfoui. Jean-Marie cherchait à recouper ses souvenirs, à retrouver les Algériens qu’il avait connus, bouleversé parfois lorsqu’ils apparaissaient, ou quand se dévoilait l’envers de son histoire. Sa collection de photos guidait Ammar dans ses rencontres, il confrontait les paysages d’hier et d’aujourd’hui. J’enregistrais les cheminements de l’enquête, apportant quand je le pouvais les indications tirées de mes propres souvenirs et des archives que j’ai consultées, m’efforçant de tenir le fil des échanges qui nous entraînaient jusqu’aux bords où recommence le silence.

 

 

L’heure est venue, peut-être, où nous pouvons reconnaître et accepter ce passé qui fut le nôtre. Il y aura soixante ans bientôt que Zouaoui, le grand-père maternel d’Ammar est tombé avec son compagnon Hocine Chaouech sous les yeux de sa femme Drifa Chaouech et de ses filles. Baya Foufou, Dehbia Haddad, Nouara Toumi, et Fatiha, sa fille de quatre mois qu'elle portait dans ses bras, sont aussi mortes ce jour-là.

 

 

Qu’ils prennent place dans nos mémoires.